dimanche 5 juillet 2015

Huaraz et la Cordillère Blanche - 11 au 18/04

Nous avons quitté la chaleur du désert de Nazca, subit de trop longues heures de bus, traversé la chaotique capitale péruvienne de nuit, et finalement passé une nouvelle nuit dans le bus pour, enfin, arriver aux aurores au cœur de la cordillère blanche : Huaraz.




Une fois de plus, nous sommes accueillis à la gare par les chasseurs de touristes et sommes gracieusement transférés à une auberge offrant un bon rapport confort/prix.

Nous nous installons et nous reposons un peu en attendant que la ville se réveille.
Un peu plus tard, le fils des propriétaires passe nous chercher pour nous conduire à son agence et nous présenter les attractions touristiques de la région... et ses tours associés. Tous les tarifs annoncés sont prohibitifs...
Alors que nous quittons l'agence, nous passons devant une autre affichant des prix bien plus raisonnables, et après une rapide discussion nous signons pour un tour à Chavin le lendemain.

Le lendemain donc, sur la route menant aux ruines, nous profitons d'un rapide arrêt près d'un lac...



... puis un second au niveau du tunnel permettant de franchir le col à plus de 4500m d'altitude. Ce dernier est orné de deux jaguars indiquant la direction à suivre avec l'orientation de leur corps. Ce sont les ancêtres Chavins de nos flèches directionnelles !


Chavin de Huantar est un site archéologique construit en plusieurs étapes entre 900 avant JC et 300 après JC, et est donc une civilisation pré-Incas. C'était un centre religieux et culturel où les représentants des différentes tribus et communautés se rendaient pour qu'on leur y enseigne les différents savoirs qui y étaient précieusement gardés. Ils y apprenaient notamment, grâce à l'observation des astres et à l'étude des saisons, quelles cultures auraient un meilleur rendement et devaient donc être favorisées pour l'année à venir.


L'enseignement passait bien évidemment par tout un rituel religieux, avec notamment une période de purification/jeûne et d'ouverture de l'esprit à l'aide du fameux cactus hallucinogène, le san Pedro (pour cette étape, le chanceux qui va recevoir l'enseignement est descendu dans un puits où il aura ses visions).


Il s'y tenait également d'importantes cérémonies sur de grandes places accessibles à la population, d'abord pour assister aux cérémonies, puis pour y descendre et y commercer, les habitants des environs venant troquer leurs produits à l'occasion de ces grands rassemblements.



Enfin, ce serait dans les couloirs labyrinthiques des temples que les pèlerins recevaient le fameux enseignement des shamans.


Parmi les particularités de Chavin, nous découvrons un monolithe représentant un Dieu, le Lanzón, et nous apprenons que le temple principal était à l'origine bicolore - une moitié blanche, l'autre noire - en référence à l'éternelle dualité : homme/femme, soleil/lune, bien/mal, ...



Autre particularité de Chavin : les "cabezas clavas" ou têtes clés. Ce sont des pierres saillantes taillées en forme de têtes qui décoraient le temple principal. Ces têtes combinent des visages humains et des traits d'animaux, et représentent les différents dirigeants/shamans du site sous l'emprise du San Pedro. Aujourd'hui, il n'en reste plus qu'une, originale, encore accrochée au mur.


Nous visitons par ailleurs un musée regroupant tous les artefacts et cabezas clavas trouvés sur le site... photos interdites, pas d'illustration pour vous !

Suite à cette première visite, nous prenons un jour de repos/préparation en vue de faire 4 à 5 jours de trek. Les informations recueillies divergent : les professionnels du tourisme et l'Office des Parcs stipulent que la présence d'un guide est obligatoire. L'Office du Tourisme et la Guilde des Guides confirment, mais nuancent en précisant que les sentiers sont parfaitement balisés et qu'il est facile de faire sans, malgré l'obligation... et conseillent de faire le trek en sens inverse pour diminuer les risques de contrôle !

Nous partons donc équipés pour 5 jours d'autonomie en direction de l'arrivée du trek de Santa Cruz. Se rendre jusque là est déjà une aventure en soi : il nous faut prendre un bus, puis un taxi où nous sommes entassés à 7 (2 à l'avant avec le chauffeur, 4 à l'arrière, et un dans le coffre sur les sacs...) pour enfin atteindre le petit village cul de sac d'où part le sentier, après 3h de route dont une dans le taxi sur route de cailloux...

Nous sommes donc déposés au départ du sentier, déjà clairement balisé. Après 10 minutes de marche nous atteignons le point de contrôle des guardaparques (gardes forestiers), déjà ouvert malgré l'heure matinale. Décidés à jouer les imbéciles et à passer coûte que coûte sans guide, on s'y présente en feignant la sérénité. L'officier nous accueille chaleureusement, nous vend les tickets d'entrée au parc Huascaran, puis nous fait simplement signer une décharge du fait que nous ne sommes pas accompagnés. Et voilà, c'est tout ! Facile !


Normalement, nous prévoyons de remonter la vallée en 2 jours, de passer le col à 4800m en 1 jour, puis de redescendre dans la vallée opposée le 4ème jour avant de faire un petit trek de 1 jour pour aller voir un lac isolé.

Le premier jour, donc, nous remontons la superbe vallée.



Toute cette première journée se passe bien, malgré l'ascension sans fin, et nous atteignons comme espéré un très joli lac pour camper.



En fin de journée, alors que nous montons le camp, une averse débute. Elle durera toute la nuit, nous empêchant notamment d'utiliser le réchaud pour cuisiner nos pâtes... nous tapons dans nos réserves ne nécessitant pas de cuisson.

Le lendemain matin, la pluie a cessé, mais la couverture nuageuse persiste. Ça n'est pas cool, car nous espérions voir les pics et glaciers aujourd'hui !


Nous reprenons la route en espérant une éclaircie. La pluie de la nuit a fait monter le niveau du torrent que nous longeons, et nous nous retrouvons coincés un moment à tenter de contourner un passage inondé... un peu d'escalade (avec beaucoup de prudence) nous permet de poursuivre sans passer à l'eau !

Un peu plus loin, nous atteignons une intersection, un sentier permettant de monter sur un petit plateau élevé offrant une vue sur quelques pics, glaciers et un lac. Le temps étant de plus en plus menaçant nous hésitons longuement à faire le détour. Finalement nous décidons de cacher nos sacs et d'y aller léger, rapidement. L'expérience s'avère malheureusement vaine, la couverture nuageuse s'intensifiant, la pluie signant son retour.

Nous rebroussons chemin avant d'arriver au lac, inutile de se faire du mal pour rien, récupérons nos sacs et reprenons le sentier du trek.
Nous arrivons au camp précédant le col aux alentours de midi. La pluie s'est déplacée vers l'aval, et nous profitons d'une superbe éclaircie pour notre déjeuner, quelques pics et un superbe glacier s'offrant à nos yeux.



La journée étant encore longue, et le soleil semblant persister, nous décidons de partir à l'assaut du col. Cette fois la pente est raide, bien plus difficile que celle de la vallée. Nous avons plus de 500m de dénivelé à avaler, et l'exercice s'avère épuisant. À mi-ascension, un vilain nuage et une bruine s'installent, rendant les pierres glissantes et nous gelant rapidement à cette altitude.



Il nous faut près d'une heure de plus qu'initialement prévu pour enfin atteindre le sommet, au milieu du nuage.
Nous nous offrons une pause, mais rapide compte tenu du froid frigorifique.


La descente est terrible. Beaucoup moins raide que la montée, mais la visibilité dans le nuage est de 2m, et nous peinons énormément à suivre le sentier. Qui plus est, la roche est plus glissante que jamais, nous faisant trébucher quelques fois.
Pour compliquer la tâche, Lucy glisse et se cogne la tête assez violemment. Ses réflexes (de ninja ?) lui évitent un très mauvais choc, mais le poids de son sac l'a emmené sur le côté l'empêchant de se ressaisir. La tempe tape la roche qui brise une branche de lunette et laissera un bel œil au beurre noir à la pauvre randonneuse, qui aura perdu son premier combat de boxe.
On évite le K.O. c'est déjà ça !
Mais avec des lunettes qui tiennent... comme elles peuvent, pas de visibilité et un terrain piégé et glissant, la descente qui devait nous permettre de récupérer et accélérer devient plus ardue que l'ascension du col !


Nous prenons toutes les précautions nécessaires, avançant au mieux jusqu'à ce que la nuit tombe. Ayant raté une intersection quelque part dans la descente, nous ratons par là-même le camp où nous pensions dormir. Faute de lieu adéquat pour camper, nous continuons à la frontale, suivis par quelques herbivores dont nous ne voyons que les yeux briller lorsque nous jetons un regard en arrière. C'est d'ailleurs assez inquiétant tous ces yeux qui nous suivent...

Finalement, nous atteignions la rive d'un torrent où nous perdons définitivement le sentier. Faute de mieux, nous plantons la tente au milieu des vaches, dans un petit pré surélevé, en espérant que les voisines cornues ne s'inviteront pas et ne perceront pas la bâche, la pluie étant de nouveau là depuis une petite demi-heure. Nous sommes donc de nouveau privés de réchaud, de toute façon trop épuisés pour cuisiner : crackers, biscuits et dodo !

Au petit matin, nous découvrons avec allégresse que le sentier perdu au niveau du torrent n'est pas perdu : il passe sur un petit pont 10m en amont et continue en face de nous sur l'autre rive. OUF !

La matinée de marche est pénible : Lucy n'y voit pas bien clair avec ses lunettes amputées/scotchées, et la pluie a rendu le terrain marécageux, toujours aussi glissant. Heureusement, la descente est bien moins raide, le col passé ayant laissé place à une nouvelle vallée qui descend doucement.

Petit à petit le soleil revient, nous encourageant à atteindre le village d'arrivée.



À 11h nous atteignons le poste de contrôle des guardaparques, impressionnés que nous ayons bouclé le trek en 2 jours 1/2 !
Ils nous informent par ailleurs qu'il nous faut presser le pas si nous souhaitons attraper le dernier bus de la journée, qui part à 13h... et il reste 1h30 de côte pour atteindre la route !

Nous repartons désespérés, loin d'être persuadés d'être capables d'arriver dans les temps.


La côte en question est aussi raide que le col, interminable, mais beaucoup moins glissante... et maintenant que le soleil est de sortie, il fait son possible pour nous assommer, nous étouffer, nous assoiffer... et à 2km du sommet, la pluie revient se jouer de nous !

Heureusement, nous arrivons à temps et attrapons le bus, bondé. Nous nous y entassons au mieux. Épuisés, nous décidons de ne pas faire le petit trek de 1 jour supplémentaire pour voir le lac comme prévu initialement. La pluie nous rebute trop, et il ne nous reste que des pâtes sans l'assurance de pouvoir les cuire avec ce temps pourri...

Nous rentrons donc à Huaraz, où une douche salvatrice nous accueille. Nous prenons aussi un jour de repos bien mérité.
Et nous nous nourrissons comme des rois !
Raclette avec fromage local, burger d'alpaca, pommes de terres à la huancaina, aeropuerto (plat chinois dantesque de riz/nouilles sautées/légumes/poulet) ...






Reposés et repus, nous décidons finalement de tenter une dernière sortie dans la région, du côté du glacier Pastoruri à 5240m d'altitude, à l'occasion d'un nouveau tour.

Sur la route du glacier nous profitons de quelques arrêts pour voir notamment l'antique chemin Inca (ou tout du moins le deviner, seulement matérialisé par une ligne de grosses pierres), ...


... le Puya Raimondi, plante rare, cousin géant de l'ananas (plus grande espèce de broméliacées - jusqu'à 10m de haut), endémique aux Andes et ne poussant qu'entre 3200 à 4800 m. Celle-ci ne fleurit qu'une fois dans sa vie de 70 à 100 ans et meurt après.



Nous voyons également une source naturelle d'eau gazeuse ...


... quelques peintures rupestres ...


... et enfin une petite lagune aux couleurs arc-en-ciel.


Le glacier en lui-même n'est pas très impressionnant, et pour cause, il subit de plein fouet le réchauffement climatique, menaçant de totalement disparaître d'ici moins de 10 ans.
Ça reste tout de même sympathique... si on fait abstraction du froid et de la neige ! On n'est décidément pas chanceux en terme de météo...




À proximité du glacier se cachent par ailleurs quelques fossiles, difficilement reconnaissables.


De retour à Huaraz, définitivement vaccinés contre la pluie et le froid, nous récupérons nos sacs et filons à la gare où nous prenons un nouveau bus.... de nuit !
Une fois n'est pas coutume, et malgré le prix économique, le confort y est royal, et nous passons enfin une bonne nuit sur la route nous ramenant à la chaleur du désert et de l'océan pacifique...

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